PATRIMOINE CULTUREL CUGNALAIS

1 – Définition.
Tustet en occitan c’est le heurtoir (marteau pour frapper à une porte souvent en forme de main ou d’anneau), et tuster c’est frapper.

Donc l’objectif est de cogner fort sur la porte pour réveiller toute la maisonnée. Nous voulons parler ici de « vrai tustet » avec utilisation d’une pierre et corde, pas d’un simple coup de heurtoir ou de sonnette et une fuite en galopant.

2 – Technique

Pour les portes qui ne disposaient pas de heurtoir adapté pour attacher la corde, on suspendait une pierre à la poignée de porte, et une autre corde était attachée pour permettre de s’éloigner et de se « mettre à l’abri » quand l’opération se déroulerait.

En tirant sur la ficelle (on trouvait facilement à l’époque de grandes longueurs de ficelle dans les fermes avec les botteleuses-lieuses) et en relâchant la pierre heurtait la porte et au bout de deux ou trois coups les habitants de la maison étaient réveillés.

Une petite pause pour laisser croire à un mauvais rêve …. et redémarrage des tirs et des coups pour confirmer que ce n’était pas un rêve.

Alors le spectacle pouvait commencer … en frappant les « trois coups ».

Lumières d’abord allumées à l’étage, quand il y en avait un …. Cris demandant au grand fainéant qui se cache dehors de se montrer…puis insultes en tout genre et dans les différents patois (occitan, italien, espagnol ; la clientèle était internationale) ….

Menaces de tirer un coup de fusil… Les plus intrépides, ou ceux qui connaissaient les traditions, décidaient d’ouvrir la porte et de couper la ficelle et d’enlever la pierre ….et fin du tustet.

Toutefois les opérateurs devaient quitter la zone avec prudence pour ne pas être repérés.

3 – Choix du client

Le choix de la victime était important pour que le spectacle atteigne l’intensité espérée.

Un client grande gueule, unanimement « apprécié » dans le village, un râleur contre tout et particulièrement contre ces fainéants de jeunes qui de notre temps …… qui n’avaient pas connu la guerre …. qui trainent devant le café…

Il fallait donc un « roumegaïre » de première qualité.

La quantité de clients n’était pas illimitée, mais en plus les contraintes du site réduisaient encore le nombre.

4 – Lieu adapté : éviter le risque de coup d’escopette, de « schiopetto »

Heureusement l’urbanisation intense n’avait pas encore envahi Cugnaux. Il faut une porte facilement accessible depuis la rue, et la mode pavillonnaire a supprimé souvent cette possibilité, même si dans les pavillons la proportion de client potentiel est égale à celle des zones anciennes.

Il faut pouvoir déployer la ficelle tireuse en traversant la rue et atteindre une zone « protégée », et permettant un repli sans être vu. La présence de haies, de champs et vignes étaient un atout important pour « opérer » en sécurité avec si nécessaire un renvoi de la corde pour éviter qu’un tir de fusil dans la direction de la corde ne soit dommageable aux opérateurs.

Donc la reconnaissance du terrain et la préparation étaient importantes.

Il fallait bien choisir la porte, et éviter les portes vitrées. En effet la vitre pouvait ne pas résister au vibrations et chocs et se briser. Et là, le « propriétaire des lieux » qui se trouvait par malheur juste derrière la porte sans oser sortir pouvait être blessé.

Donc le tustet un peu improvisé, après par exemple une réunion tardive du comité des fêtes, pouvait se terminer avec un dépôt de plainte …. et le député-maire mobilisé (ayant assez facilement identifié les « coupables ») obligé de jouer les pacificateurs et d’arrêter la gendarmerie dans ses investigations.

(Histoire vraie …. Mais il y a prescription)

Un tustet d’anthologie au milieu des années 60

Une rue centrale de Cugnaux, non urbanisée sur un côté mais avec une belle haie et derrière une grande prairie.
L’équipe de préparation fabriqua un mannequin empaillé. Le mannequin fut installé contre la haie face à la maison visée. L’éclairage à l’époque était faible et on ne pouvait distinguer qu’une ombre.
Quand la « victime » bien réveillée après une salve de coups sur la porte, depuis la fenêtre de l’étage finit par distinguer la silhouette du mannequin ….. un « dialogue » savoureux, à une voie, s’engagea et dura longtemps pour la plus grande joie des « opérateurs »
Après ce long « débat », la « victime » rassurée par le mutisme de son adversaire finit par sortir, traverser prudemment la rue pour se jeter sur le « mannequin » …. Face à cette découverte, les jurons se mirent à redoubler.

5 – Urbanisation et mort du tustet

L’urbanisation massive de la fin des années 60 a entraîné la mort du vrai tustet. Difficile d’imaginer aujourd’hui une ficelle qui traverse une rue avec le trafic routier même à des heures tardives.

L’urbanisation a fait disparaître également les haies et champs à proximité des maisons.

6 –Revendication

Le vrai tustet s’est éteint fin des années 60, début des années 70.

Cugnaux compte maintenant d’autres activités nocturnes.

Il faut revendiquer l’Inscription du tustet cugnalais au patrimoine culturel immatériel de la ville de Cugnaux pour respecter le « devoir de mémoire ».

PS : Cette note technique précise contribue par son caractère historique au devoir de transmission inter générationnel. Elle devrait permettre des tentatives de reconstitution historique.

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